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Fémincide Statement

Jamilia, nous ne t’oublierons pas

Un an après le féminicide à Büren an der Aare

Il y a un an, dans la nuit du 23 au 24 avril 2022, Jamilia, une femme ayant fui l’Afghanistan et mère de cinq enfants, a été poignardée par son mari dans le centre d’hébergement pour réquerant-e-x-s d’asile de Büren an der Aare, dans le canton de Berne. Dimanche passé, le 23 avril 2023, nous nous sommes retrouvé-e-x-s au parc municipal de Bienne pour commémorer Jamilia.

L’année passée, une lettre ouverte a été envoyée à la CRS, à la police cantonale bernoise et au service des migrations de Berne, dans laquelle il a été souligné que Jamilia, qui cherchait ici en Suisse une protection contre la violence qu’elle subissait en Afghanistan, avait déjà attiré l’attention sur la violence de son mari plusieurs mois avant sa mort. La CRS n’a réagi ni à la lettre ouverte ni à une manifestation organisée devant son bâtiment de Zollikofen en août 2022. Le féminicide de Jamilia a été le cas le plus extrême de violence patriarcale dans un centre d’asile, mais il est loin d’être un cas isolé. La violence sexualisée et patriarcale envers les personnes qui cherchent protection et sécurité en Suisse est omniprésente, mais elle peut et doit être évitée. Nous réitérons nos demandes à la CRS et à toutes les autres organisations qui gèrent des centres d’hébergements pour requérant-e-x-s d’asile :

– une information immédiate et active dans les centres d’asile sur le thème de la violence patriarcale (au moins des affiches en différentes langues, des informations sur les offres externes de soutien et les contacts d’organisations spécialisées ; élaboration des affiches en concertation avec une organisation spécialisée)

– la mise en place d’un travail d’information systématique et régulier par des services spécialisés comme par exemple Lantana, FIZ ou Brava,

– l’élaboration d’un guide et de processus de gestion de la violence patriarcale et des féminicides,

– un bureau externe pour déposer plainte contre la direction et des employé-e-x-s des centres d’asile

– l’accès de la société civile aux camps, par exemple par le biais du groupe « Stop Isolation ».

La politique d’asile suisse en elle-même est fondamentalement méprisante et raciste et expose constamment les personnes, en particulier les femmes, les personnes trans et queer, à des situations violentes. Afin qu’elles n’aient pas à subir en plus la violence patriarcale dans leurs logements, les revendications susmentionnées doivent également devenir une condition dans tous les mandats de travail avec des personnes réfugiées (ORS, Croix-Rouge, etc.).

Jamilia, nous ne t’oublierons pas. Tu continueras à vivre à travers nos luttes!

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Bertrand Cantat ou la culture du féminicide

Nous aurions bien voulu ne plus devoir perdre du temps à parler de Bertrand Cantat… ! Mais au moment où l’auteur du féminicide de l’actrice Marie Trintignant, qui justifie depuis 20 ans son acte en parlant de son « amour » et de sa « passion » pour sa victime, a le culot de vouloir remonter sur scène, nous apprenons que les noms de Trintignant et de Cantat sont évoqués régulièrement par des rappeurs francophones… et ceci dans des chansons qui glorifient sans mesure la violence faite aux femmes/personnes féminisées et les féminicides.

Nous sommes choquéexs, nous sommes en rage.

Si nous essayons de contextualiser ce phénomène, nous arrivons au constat qu’il existe quelque chose comme une « culture du féminicide », comme il existe une culture du viol. Un ensemble de pensées, d’images, de propos et de comportements qui normalisent, banalisent et justifient la violence physique envers les femmes allant jusqu’au meurtre. 

Il persiste encore des idées encore très profondément ancrées sur la co-responsabilité de la femme/personne féminisée maltraitéex. Le tabou autour des violences physiques continue à exister et ces faits sont renvoyé au domaine privé (dont témoigne l’utilisation de termes comme « drame familial ») dans lequel des personnes extérieures ne sont pas censées s’immiscer. Les femmes et personnes féminisées qui se défendent contre leurs agresseurs sont criminaliséexs et condamnéexs comme si elles auraient dû choisir la mort plutôt que de l’autodéfense (pourtant parfois vue comme légale dans d’autres circonstances, quand il s’agit d’une violence « pas domestique »).

La notion de la culture du viol tout comme celle de la culture du féminicide renvoie également au contexte social qui rend ce genre d’acte pensable voire faisable. Car un féminicide n’est pas un acte d’un individu fou complètement isolé de la société. Dans notre société, les hommes apprennent encore avoir le droit de posséder le corps d’une femme ou d’une personne féminisée (de le regarder, de le toucher, de profiter de son travail gratuit, de le contrôler, d’en profiter sexuellement, de le tuer).

Certes, pas tout le monde écoute du rap français qui prétend qu’il faut tuer une femme/personne féminisée pour être un vrai homme, mais si notre société n’arrive même pas à nommer de féminicide un acte aussi violent que celui qu’a commis Bertrand Cantat, à le condamner fermement et à dire haut et fort qu’on ne tue par passion ou par amour, alors en ce cas, il existe clairement une culture qui produira encore d’autres féminicides. Ces rappeurs décrivent simplement de manière plus crue et plus explicite ce qui ne va pas dans notre société et dans nos socialisations genrées.

Heureusement qu’il existe aussi des musiciennexs génialexs qui créent une culture résolument féministe.

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L’autodéfense contre la violence patriarcale est légitime !

A la femme de Thonon-les-bains: on pense que tu as agi en autodéfense contre ton compagnon violent. Si c’est la cas, saches que tu as tout notre soutien. 

La presse raporte qu’en mars 2023, une femme a poignardé son compagnon à Thonon, près de Genève. Si aux premiers abords, on pourrait penser que les violences conjugales concernent aussi bien les hommes que les femmes, la réalité est tout autre.  

Alors que les hommes sont violents pour assoir leur possessivité, la violence contre les hommes est en grande majorité exercée en autodéfense. En continuant la lecture on apprend que le compagnon en question a été condamné pour violences conjugales en 2022. On ne sait rien de plus de cette affaire pour l’instant mais il y a de grandes chances que cette femme aie poignadé sont compagnon pour défendre sa vie.  

En tant que campagne de lutte contre les féminicides, on veut crier haut et fort que l’autodéfense contre les violences patriarcales est légitime. A toutes les personnes qui ont choisi la vie et on trouvé un moyen de se défendre, on vous soutien de tout notre coeur.  

A travers le monde, des millers de femmes sont criminalisées pour avoir sauvé leur vie. En France Alexandra Richard est incarcérée, condamnée à 10 ans de prison pour avoir tué un mari qui la torturait.  

Il est primordial de soutenir toutes les femmes, et plus largement toutes les personnes concernées par la violence patriarcale, qui sont criminalisées car elles ont agi en autodéfense. 

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Les femmes âgées, victimes ignorées des féminicides

Elle avait 79 ans, elle habitait à Sierre. On ne connaît pas son nom. Sa voisine la décrit comme une personne douce et souriante. Le 21 mars 2023, son mari l’a tuée a coups de couteau.
Un “drame familial” selon le communiqué de la police. Un meurtre incompréhensible, c’était un homme “si gentil”, rapporte une voisine.
Ces meurtres sont pourtant le résultat d’une barbarie ordinaire, d’une violence systémique. Il ne s’agit pas de meurtres privés commis par des monstres mais de meurtres de masse, dont la responsabilité est collective.
Cette violence brutale n’a pas de limite d’âge et les féminicides de femmes âgées sont souvent ignorés ou minimisés. Pourtant les femmes âgées ont un risque élevé d’être concernées par des violences patriarcales, notamment en raison de l’isolement et de la dépendance financière envers leurs partenaire due à leur retraites plus faibles.
Cette violence n’est pas une fatalité ! Si le système patriarcal invisibilise les femmes âgées, cela ne les empêche pas de se mobiliser. Et quand les femmes âgées luttent aux côtés des jeunes femmes, des personnes trans et queer, le système patriarcal peut trembler.

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Le patriarcat tue, la police aussi

Il y a 2 ans, le 19 mars 2021, Evangelista Mañón Moreno (Eli) a été tué à Bussigny par son compagnon. Il avait travaillé comme policier à Lausanne et il a utilisé son arme de service pour tuer Eli. Auparavant, il a signalé avoir peur de « faire une bêtise » avec l’arme, mais il n’a pas été pris au sérieux. Un policier qui tue, c’est inimaginable… ? Et pourtant, cela arrive bien trop souvent !

Nous sommes encore sous le choc après le quadruple féminicide à Yverdon-les-Bains le 9 mars 2023. L’auteur n’a pas seulement tiré des balles sur Coralie, Alyssia, Madyson et Chelsey, ses trois filles et son ex-partenaire, il a aussi fait exploser la maison familiale. Plus rien ne devait rester de la vie de ces 4 femmes. L’auteur était un ex-gendarme.

Le deuxième féminicide commis par un policier en deux ans dans un canton pourtant pas si grand. Peut-on vraiment parler de hasard ? Eh ben, non. Le féminicide est une expression particulièrement extrême de ce que cela veut dire d’avoir été éduqué « comme un homme » en Suisse. Ne pas savoir affronter ses émotions autrement que par la violence, ne pas pouvoir chercher efficacement de l’aide, croire qu’il est légitime et de son droit de posséder les personnes avec qui on est en relation.

Propriété privée, vous avez dit ? En Suisse, aucun autre bien est aussi bien protégé. Les lois autorisent les tribunaux à punir une personne qui a volé le bien d’autrui bien plus sévèrement qu’une personne qui a ôté la vie, et ils le font avec une systématique effrayante. La mission de la police est souvent décrite comme la défense de l’État de droit. Pas étonnant alors que dans un pays qui valorise autant la possession privée, les policiers aient un sens particulièrement développé de la possession. Ajoutons à cela l’habitude de manier des armes à feu, d’utiliser la violence, la camaraderie et l’entre-soi des copains qui vont vous rappeler constamment ce qu’est un « vrai homme », l’impunité des policiers violents (critiqués par de nombreuses ONG ainsi que des organisations internationales).

Notre État est aussi patriarcal, c’est-à-dire qu’il est a été conçu sur le modèle d’une famille avec un patriarche à la tête et qu’il définit ce cadre de vie comme la norme. Des nombreuses lois comme par exemple les lois sur les impôts ou le droit de famille en vigueur en témoignent encore. La femme comme subordonnée à l’homme : la police comme bras armé de l’État et comme garante de l’ordre public et des bonnes mœurs comme définis par les lois, défend aussi cette vision du couple.

Il est important de se rappeler des histoires d’Eli, Coralie, Alyssia, Madyson et Chelsey. Elles sont mortes à cause du patriarcat mais aussi à cause de la police en tant qu’institution.

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Un quadruple meurtre n’est pas un drame familial

Jeudi dernier, cinq personnes ont été retrouvées mortes dans une maison incendiée à Yverdon-les-Bains. Hier, la police cantonale vaudoise a communiqué que toutes les personnes avaient des blessures de balles et qu’une arme à feu a été retrouvé à côté du père. Dans son communiqué, la police écrit qu’elle « privilégie l’hypothèse d’un drame familial qui se serait produit à huis clos ». Tous les articles de presse parus à ce jour ont repris ce terme…

Les trois filles ont vécu jusqu’à 5, 9 et 13 ans, la femme jusqu’à 40 ans. Très probablement, elles ont été tuées une par une par leur père ou ex-partenaire. Un drame assurément, mais pas un « drame familial » !

« Drame familial » laisse entendre qu’il s’agissait d’un événement qui s’est produit à l’interne de la famille, à la maison, dans le domaine privé. Mais la violence domestique a toujours une composante sociale (les circonstances sociales qui mènent une personne à utiliser la violence ; ce que nous apprenons dans notre société sur comment vivre nos relations et nos ruptures ; la violence comme partie constituante de la socialisation d’être un homme) et elle nous concerne tous et toutexs !

Cela fait trop longtemps déjà que la violence faites aux femmes* est traitée comme une affaire privée, comme quelque chose que les deux personnes concernées devraient régler entre elles. En continuant d’utiliser ou d’accepter des termes comme « drame familial », nous normalisons cette violence et la rendons possible. Le quadruple féminicide d’Yverdon-les-Bains nous rappelle extrêmement dramatiquement que nous ne devons pas fermer les yeux.

Il n’y a pas de « drames familiaux », il n’y a que de la violence qui nous concerne tous et toutexs et que nous devons combattre ensemble, de manière solidaire et déterminée !

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Critique de la nouvelle stratégie d’aide aux victimes du canton de Berne

En novembre 2022, le Conseil-exécutif du canton de Berne a adopté la stratégie cantonale d’aide aux victimes 2023-2033. Dès la procédure de consultation, le document stratégique a fait l’objet de critiques massives de la part de services spécialisés. Nous aussi, nous critiquons la stratégie pour les raisons suivantes :


1 Mesures racistes et classistes
Les mesures proposées ne sont pas assez axées sur les besoins des personnes concernées, en mettant plutôt l’accent sur les auteurs∙trices de violence migrant∙es. La stratégie d’aide aux victimes est ainsi détournée au profit d’une politique de migration et d’asile raciste sans renforcer les personnes touchées par la violence. De même, la proposition de réduire l’aide sociale aux agresseurs∙euses comme moyen répressif ne constitue pas une stratégie efficace pour lutter contre la violence patriarcale, mais crée une inégalité de traitement des agresseur∙euses en fonction de leur origine de classe. De plus, dans certains cas, la réduction de l’aide sociale ne punit pas seulement l’auteur∙trice de la violence, mais aussi la personne concernée par la violence, qui peut se trouver dans une relation de dépendance avec l’auteur∙trice.


2 Logique binaire
Toute la stratégie d’aide aux victimes est exclusivement orientée sur les femmes et les filles. De nombreuses personnes touchées par la violence patriarcale sont ainsi rendues invisibles et exclues des offres de protection. Une stratégie d’aide aux victimes devrait inclure toutes les personnes TINFA (TINFA= trans, inter, non-binaire, féminin, agenre). Les personnes trans et les personnes non-binaires sont particulièrement exposées à la discrimination et à la violence dans la société patriarcale et hétéronormative dans laquelle nous vivons – pourtant, la plupart des « lieux de protection » ne leur sont pas accessibles.


3 Suppression de structures de soutien
Une stratégie d’aide aux victimes devrait être orientée sur les personnes concernées : les offres devraient être axées sur leurs besoins et être à bas seuil. La suppression prévue de structures existantes (p. ex. la fermeture du site de l’Oberland bernois, le fait de rendre impossible l’ouverture d’un foyer pour filles) et le manque de volonté d’allouer des fonds suffisants restreignent massivement l’accès à des offres à bas seuil. Et ce, alors que le nombre de personnes concernées n’a cessé d’augmenter au cours des dernières années.


4 Inversion auteur-victime
La stratégie prévoit que les victimes de violence ayant de faibles connaissances de la langue allemande puissent être obligées d’acquérir des « compétences linguistiques ». Il s’agit là d’une inversion classique et discriminatoire des auteur∙trices et des victimes. En revanche, la stratégie omet les éléments les plus importants dans le conseil aux victimes, à savoirs qu’il s’agit de conseiller des personnes traumatisées, ce qui nécessite du temps et une attention particulière, et la nécessité de s’assurer de la sécurité des personnes concernées.


Cette critique concerne spécifiquement la stratégie d’aide aux victimes 2023-2033. Nous estimons important qu’il existe aujourd’hui des offres d’aide fonctionnelles, accessibles et le moins discriminatoires possibles pour les personnes touchées par la violence patriarcale. En outre, nous estimons que des perspectives révolutionnaires et une critique fondamentale de l’État capitaliste et bourgeois sont nécessaires. Car la violence patriarcale se base sur des structures patriarcales ayant également une dimension étatique et institutionnelle. L’État et ses institutions comme la police et le système judiciaire ne garantiront jamais la sécurité de toutes les personnes face à la violence patriarcale et raciste et ne contribueront surtout pas à mettre fin à la violence patriarcale.

Au lieu de compter sur les politicien∙nes, la police, les juges et d’autres complices du patriarcat, nous devons formuler et obtenir par la lutte nos propres solutions et projets de société, basés sur la communauté, l’aide mutuelle, le soutien réciproque et la solidarité.

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Bravo, mais non merci !

Le 15 janvier passé, Christophe Moreau a été arrêté par la police et placé en détention provisoire à Porrentruy. Les fans de cyclisme le connaissent notamment pour avoir fini en 4ème place du Tour de France en 2000. Il y a deux semaines, il a menacé de tuer son ex-partenaire et ses deux filles.

En 2019, la police jurassienne a ignoré les nombreux appels à l’aide de la part de Mélanie et de son entourage. Mélanie a été tuée par son ex-partenaire le 21 octobre 2019 à Courfaivre. Par la suite, l’Association Mél a vu le jour pour amener au grand jour la question des violences faites au femmes et des féminicides.

La réaction rapide et décidée de la part de la police et de la justice jurassienne est peut-être due au fait que l’ex-partenaire de Christophe Moreau est une personnalité influente et connue dans le canton de Jura, mais l’engagement de l’Association Mel a sans doute joué un rôle important aussi.

Nous souhaitons que la société toute entière nous défende, plutôt que de devoir faire appel à la police et à la justice, mais en attendant que cela soit le cas, nous saluons le signal envoyé par les autorités jurassiennes à tous les hommes violents.

La police et la justice sont des instances qui, historiquement, ont été mis en place pour défendre un ordre dans lequel certaines catégories de personnes détiennent le pouvoir au détriment des autres. Ces dernières ont logiquement peu de chances à être entendues quand elles font appel à la police ou à la justice. De plus, la soumission des « femmes » étant nécessaire au bon fonctionnement du système que défendent la police et la justice, ces deux instances ne sont, en fin de compte, pas là pour garantir nos droits et notre bien-être.

Apprenons à nous défendre nous-mêmes. Soyons solidaires entre nous et condamnons fermement et publiquement chaque acte de violence. Pour qu’un jour, nous n’ayons plus besoin d’autres personnes pour défendre notre vie et notre liberté !  

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Revue de livre

Nos pères, nos frères, nos amis – Un livre à ne pas lire

Le sous-titre « Dans la tête des hommes violents » dit déjà tout, pourtant j’avais l’espoir de trouver un peu plus qu’un simple récit de ce qui peut bien se passer dans la tête d’un homme qui exerce de la violence sur une femme (oui, oui, le livre est aussi binaire que cela). L’auteur étant un journaliste, il maîtrise bien le story-telling et tout à coup je me retrouve captivée par ce livre. Pourtant, à chaque fois que je le pose, je me sens mal à l’aise et plus nous avançons dans la lecture, plus nous commençons à avoir des doutes si je ne suis pas en train de perdre mon temps. Je tiens bon et arrivée à la dernière page, je conclus : effectivement, ce livre ne vaut pas la peine d’être lu, à moins que vous soyez masochiste. Les noooombreux récits du point de vue des « hommes violents » contraignent la lectrice à ressentir une empathie que je ne veux pas avoir et pour une personne ayant été confrontée à la violence masculine, ce livre est simplement douloureux à lire. Ces manières de justifier la violence et de donner la responsabilité à « la femme », je les ai entendues de vive voix – et chaque fois était une de trop. Mais peut-être que l’auteur du livre a tout simplement compris que c’est beaucoup plus vendeur quand ce sont des hommes qui parlent… même si la teneur en information de ce qu’ils disent est proche de zéro.

Pour vous éviter de devoir passer par le même déplaisir de lecture, voici ce livre en résumé : l’auteur commence à s’intéresser à la question de la violence masculine, intègre des groupes de parole d’hommes violents et nous retranscrit leurs paroles sur 200 pages. Le tout ponctué de deux extraits de livres de Virginie Despentes (enfin, je respire un peu !) et de l’avis de quelques psychologues et expert-es, qui nous expliquent que les hommes sont violents et les femmes provoquent cette violence et la subissent sans jamais partir, car elles et ils ont été contaminé-es par la violence dans leur enfance. L’auteur donne également la parole à une psychanalyste qui nous raconte que si elle doit faire une expertise d’un homme violent, elle demande à rencontrer sa mère car « il y a souvent un rapport incestueux » (si vous aviez encore besoin d’une preuve que la psychanalyse, c’est vraiment la merde, en voici une !) Après nous avoir infligé tant de récits détaillés de violences insupportables et des excuses lamentables et misogynes que les mecs se racontent, l’auteur arrive à la conclusion que cette « épidémie » de violence n’a pas d’autre solution que de mieux éduquer les enfants.

En gros, le seul moment où ce livre touche un peu le puck, c’est quand l’auteur décrit son étonnement face à la réalisation que les hommes violents ne sont pas des monstres mais « nos pères, nos frères, nos amis ». Étant donné que cette information-là se trouve déjà dans le titre, épargnez-vous le reste de la lecture de ce livre !  

Si maintenant vous vous demandez quel est notre position et de quel point de vue nous jugeons ce livre : donner autant de la place à la parole des hommes violents et à leurs justifications sans les remettre en question et de mettre autant en avant la (co-)responsabilité des femmes fait fortement penser au mouvement masculiniste qui essaie de camoufler la partie structurelle des violences sexistes en noyant le poisson dans une mer de larmes d’hommes. Pour nous ce n’est pas acceptable.

Au lieu de nous dire de mieux éduquer les enfants, l’auteur de ce livre aurait bien fait de questionner les socialisations menant à des comportements violents d’un côté et autodestructeurs de l’autre, de pointer du doigt les fondements économiques et culturels de la dépendance à l’autre et de l’impossibilité de partir d’une situation violente et de tout simplement dire qu’il est inacceptable d’exercer de la violence sur d’autres et que c’est de la responsabilité de l’auteur de violence de trouver une solution pour ne plus être violent.

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Action Statement

Solidarité avec les camarades de Bâle

Contre les violences patriarcales et policières !

Police d’État, valet du patriarcat !

Luttons contre la police, l’État et le patriarcat : solidarité avec toutes les personnes concernées par la violence policière.

Le 25 novembre, des femmes, des personnes trans, inter, non-binaires, agenres et queer sont descenduexs dans les rues du monde entier pour protester contre la violence patriarcale.

A Bâle, la police a tenté d’empêcher la manifestation dès le début, l’a attaquée avec des gaz lacrymogènes et des tirs de LBD. Après la manifestation, plusieurs manifestantes ont été arrêtées et ont à nouveau subi des violences policières.

Par son action, la police montre une fois de plus de quel côté elle se trouve : du côté de la violence, du côté du patriarcat, du côté du système dominant sexiste, queerphobe, raciste et capitaliste.

Cette violence policière à Bâle contre les femmes et les queers n’est pas un cas isolé. Elle n’est pas non plus le fruit du hasard. La police, l’armée et les États répressifs exercent actuellement partout dans le monde une violence à l’encontre des luttes émancipatrices et révolutionnaires.

Cette violence est profondément ancrée dans notre système actuel : il n’y a pas de police ni de policier* dans le monde qui ne (re)produise pas quotidiennement la violence patriarcale et raciste. Car la police ne protège pas les gens, elle ne protège pas les groupes marginalisés et opprimés. La police protège l’ordre dominant blanc, cis-masculin et hétéro. La police est une partie essentielle du patriarcat. Une résistance sans limite à la violence patriarcale signifie donc aussi combattre la police et l’État.

Nous sommes solidaires de toutes les personnes concernées par les violences policières et autres violences d’État. C’est pourquoi nous avons accroché aujourd’hui une banderole devant le poste de police à Bienne. Nos pensées vont à nos camarades à Bâle, mais aussi à nos camarades d’Iran, du Kurdistan et d’autres luttes dans le monde qui résistent quotidiennement à la violence patriarcale. Transformons nous aussi notre colère en force combative et solidaire.

Ensemble contre la police, l’État et le patriarcat !